par Yuan Yuan
les clients prennent leur petit-déjeuner dans le populaire restaurant Taoyuan Village, à Shanghai.
Une file d’attente apparemment sans fin serpente autour du populaire magasin App le à Sanlitun, l’un des quartiers les plus fréquentés du centre-ville de Beijing. Or, les jeunes à l’air excité dans la file ne sont pas les dévots habituels qui attendent impatiemment de mettre la main sur le dernier iPhone. L’objet de leur convoitise est en fait une tasse de thé. La file mène à Heytea, un petit magasin qui a été témoin de scènes semblab les depuis son ouverture en ao?t 2017.
Heytea – dont le nom signifie ? thé joyeux ? en chinois – a suscité le même enthousiaste à Guangzhou, Shenzhen et Shanghai avant d’ouvrir sa première succursa le à Beijing. Il n’est pas rare de devoir attendre plus de deux heures pour fina lement passer sa commande et joindre une autre file d’attente pour en fin obtenir son précieux breuvage. Chaque étape du processus est bien s?r partagée à qui mieux mieux sur les médias sociaux dans un exercice de marketing particulièrement efficace.
Mais que contient donc ce thé pour susciter une tel le ferveur ? La réponse,étonnamment, est du fromage. Spécialisée dans le thé au lait et au fromage, Heytea propose une variété de thés chinois servis sous une généreuse garniture de fromage d’environ un centimètre d’épaisseur.
le fondateur de la cha?ne, Nie Yunchen,qui est lui-même un fervent amateur de thé au lait, a eu l’idée de cette recette inhabituel le alors qu’il n’arrivait pas à trouver son breuvage préféré dans sa ville nata le,Jiangmen, au Guangdong.
? tous les vendeurs locaux mélangeaient du lait en poudre bon marché avec du thé médiocre fait à partir de sachets, a déclaré Nie. Je ne voulais pas en boire, j’ai donc décidé de faire mon propre thé au lait avec des ingrédients de bonne qualité et naturels. ?
Avant longtemps, l’idée est devenue une entreprise et un petit magasin de thé au lait à Jiangmen. Quelques années plus tard, sa cha?ne s’est étendue dans les grandes villes du pays, portée par une vague de popularité.
Nie, cependant, croit que cet engoueme nt soudain pour Heytea n’est pas nécessairement une bonne chose. Il semb le plus préoccupé que ravi par la popularité sensationnel le de son produit. ? Cette intensité initia le pourrait conduire à la mort rapide de l’entreprise ?, dit-il.
L’inquiétude de Nie est bien fondée. Depuis 2012, une série de restaurants en Chine ont soudainement acquis une forte popularité sur internet. Regorgeants d’idées novatrices ou de méthodes de marketing innovantes,ces derniers ont généré beaucoup d’attention, et bénéficié d’investissements nombreux et d’une expansion rapide. Or, dans la plupart des cas, ces restaurants ont fermé leurs portes après trois ans.
En 2012, alors que Nie ouvrait son premier magasin de thé dans sa ville nata le,He Chang, un habitant de Beijing, ouvrait éga lement une entreprise de vente de crêpes traditionnel les à Beijing.
La crêpe aux ?ufs est un petit-déjeuner commun dans le nord de la Chine, un incontournab le des stands de rue et des restaurants de la région. Mais He Chang se distinguait des autres vendeurs de crêpes arpentant les rues de la capitale. Son petit magasin joliment décoré était situé dans le quartier central des affaires de la ville,et il livrait des crêpes en Mercedes Benz.Son approche inhabituel le a rapidement fait de lui et de son entreprise un sujet br?lant sur internet.
Avec cette popularité, l’argent n’a pas tardé à affluer. Rien qu’en 2015, plus de 180 millions de yuans (27,7 millions de dollars) ont été investis dans son commerce de crêpes sous la marque Huangtaiji. le nombre de succursa les à Beijing est grimpé à 44, toutes situées dans les grands centres commerciaux et les zones d’affaires de la ville. La mode s’est éga lement propagée à Shanghai et à Guangzhou. En juil let 2016,Huangtaiji a inauguré son premier restaurant à l’étranger, à Sydney, en Australie.
Cependant, en 2017, plus de 20 points de vente de Huangtaiji ont fermé leurs portes à Beijing, les consommateurs se disant dé?us du go?t.
? Ces crêpes non seu lement go?tent moins bon, mais el les sont plus chères et moins pratiques que cel les des stands aux sorties du métro, dit Tao Wensheng, le cofondateur d’Allpku, une société de conseil située à Beijing. La plupart des points de vente sont situés dans les centres commerciaux, qui n’ouvrent norma lement pas avant 10 heures le matin, alors c’est un mauvais choix que de les vendre en tant que petit-déjeuner. ?
Des gens font la file pour mettre la main sur un thé de Heytea à Sanlitun, Beijing.
Selon Tao, cette croissance trop rapide explique le déclin de l’entreprise. ? C’est une erreur que beaucoup de restaurants font souvent ?, explique Tao.
Shu Huirong, un habitant de Beijing, dit à CHINAFRIQUE que les astuces marketing de ces restaurants ne sont en fait que des leurres, un mot que beaucoup de critiques utilisent pour expliquer pourquoi de tels restaurants sont incapab les de maintenir leur succès à long terme.
? Ils créent d’abord une histoire, soit autour de la nourriture ou du fondateur, pour attirer les consommateurs potentiels et concentrer l’attention sur le marketing au lieu d’améliorer la qualité de la nourriture et des services, explique Jia Xin, un critique gastronomique indépendant basé à Beijing. Ce n’est pas surprenant que leurs entreprises finissent par échouer. ?
La file d’attente pour Heytea est encore longue, mais pas aussi longue qu’el le l’a déjà été. Nie dit qu’il fait preuve de prudence en étendant les activités de sa cha?ne, mais la rapidité de la croissance de l’entreprise ne semb le guère ra lentir. La compagnie a levé 100 millions de yuans (15 millions de dollars) auprès d’IDG Capital en ao?t 2016.
? Je ne sais pas jusqu’à quand Heytea pourra continuer ainsi ?, dit M. Liu Changxi,un universitaire de l’Université des finances et de l’économie de Shanghai. Selon lui, les restaurants qui sont devenus célèbres par internet dérèg lent la rationalité des habitudes de consommation. le bon go?t de la nourriture ou des breuvages n’est plus aussi important qu’avant. pour les consommateurs, il s’agit plus d’un moyen de montrer à leur entourage qu’ils ont réussi à obtenir quelque chose de très diffici le à avoir.
? Si ces restaurants veu lent survivre à une concurrence aussi intense, ils devront faire un effort réel, pas seu lement à travers des moyens superficiels comme le marketing et la publicité, mais par l’amélioration des services et de la nourriture ou des breuvages qu’ils servent ?, conclut M. Liu. CA